Alger, le 30 mars, 2016
Mesdames et Messieurs,
Nous remercions les organisateurs d’avoir invité le mouvement Rachad à cette rencontre que nous espérons utile et constructive.
Les forces politiques d’opposition et les partis du pouvoir eux-mêmes s’accordent aujourd’hui, totalement ou partiellement, sur le diagnostic du problème algérien caractérisé par l’absence de légitimité, principale expression de la crise politique en Algérie depuis l’indépendance, crise qui s’est aggravée suite au coup d’état du 11 janvier 1992.
Dès sa naissance en avril 2007, Rachad a souligné le fait que ce déficit de légitimité avait conduit à la militarisation du pouvoir, à la restriction des libertés publiques, à l’exclusion politique et à l’instrumentalisation de la justice. S’en est suivie de fait une grave fracture sociale, une crise identitaire, un effritement de la souveraineté nationale, un échec économique et une corruption politique, administrative et financière à grande échelle.
D’emblée, Rachad a considéré que le changement radical non-violent était un choix stratégique pour résoudre le problème algérien et édifier un Etat de droit, régi par les valeurs de légitimité et de souveraineté. Aujourd’hui, notre mouvement se réjouit de constater que cette revendication est portée par le plus grand nombre, encourageant ainsi les élites politiques nationales à agir ensemble pour réaliser ce changement tant souhaité par le peuple algérien.
Rachad soutient tout effort engagé par les forces nationales libres pour unir les Algériens en vue d’agir de manière concertée et consensuelle, loin de tout paternalisme, pour édifier un véritable Etat de droit. Cette même approche qui avait conduit en 1995 à la « Plateforme du contrat national », s’était renouvelée en novembre 2008 à l’occasion d’une rencontre consacrée aux « Perspectives de changement politique en Algérie » à laquelle Rachad avait participé aux côtés de plusieurs mouvements et personnalités politiques et syndicales, dont Feu Abdelhamid Mehri ; les participants à cette rencontre avaient alors affirmé leur soutien sans réserve à toutes les initiatives qui prônent ce changement et appelé à ce qu’elles se multiplient à tous les niveaux dans la société ; l’initiative de mai 2012 à laquelle Rachad a participé dans le même esprit avait conduit à la « Plateforme nationale pour un changement démocratique réel en Algérie ».
L’approche de Rachad relativement à un processus de changement radical non-violent en Algérie découle des exigences suivantes :
1) L’absence d’indicateurs sur l’éventualité que le pouvoir prenne l’initiative d’un processus de changement effectif qui épargnerait l’Algérie d’un danger d’effondrement : continuer à penser qu’un changement de l’intérieur du pouvoir, dans le cadre de ses structures et selon les règles qu’il fixe, est illusoire. Cette attitude contribue au contraire à prolonger la vie d’un régime qui a besoin d’une vitrine démocratique constituée d’assemblées sans valeur qui ne servent pas les intérêts du peuple. Par conséquent, Rachad préconise le boycott et le retrait de ces assemblées par toutes les organisations politiques algériennes.
2) Devant les dangers qui menacent la pérennité du pays il est impératif que les élites politiques sincères soient à l’avant-garde pour sensibiliser, organiser et guider la société afin d’opérer le changement radical attendu.
3) Rachad croit en la nécessité d’associer toutes les forces nationales sincères, et ce, quelles que soient leurs idéologies, leurs tendances politiques ou leurs secteurs d’activité. Dans les circonstances cruciales que traverse le pays, ces forces doivent se placer au-dessus de tout conflit et se rassembler autour d’un projet national à même de sauver la Nation.
4) Afin que le changement soit réel et effectif, il doit être radical quant à la nature même du pouvoir politique en Algérie, affranchi du contrôle imposé par l’armée, les services de renseignements ou les autres appareils sécuritaires. Il est primordial d’établir dans notre pays des mécanismes légaux garantissant le contrôle démocratique effectif de la police, de l’armée et des services de renseignement, et nous vous invitons à ce sujet à consulter la « Résolution sur la civilianisation de l’Etat et le contrôle démocratique des forces armées », adoptée par le congrès de Rachad en décembre 2015.
5) Rachad est convaincu que la méthode non-violente de changement est la plus efficace et la moins onéreuse mais rappelle néanmoins que le changement non-violent n’est pas synonyme de soumission à l’autoritarisme qui viole la constitution et confisque les droits fondamentaux des citoyens. Le processus non-violent ne signifie pas pour Rachad de circonscrire notre action dans le cadre défini ou imposé par un pouvoir qui piétine la légitimité. Il faut au contraire dépasser ce cadre et aller vers une action non-violente de terrain où les élites politiques fusionneraient avec les forces populaires, partageraient leurs préoccupations et leur cause et se dresseraient à leurs côtés sur le terrain.
6) Rachad veille vigoureusement à ce que l’Algérie reste unie, rassemblant tous ses enfants dans le cadre d’une réconciliation nationale réelle.
Rachad est prêt à collaborer avec toutes les forces politiques sincères dans tout projet national rassembleur respectant ces exigences et qui s’engagent dans la voie d’un changement réel à même de sauver l’Algérie.
Merci de votre attention.